dimanche 8 août 2010

Le travail de nos élus dans les institutions …Un an après.


Le travail de nos élus dans les institutions …C'est une nouvelle rubrique de LA VOIE DU FLNKS, le journal du FLNKS. Dans le n° 9, le journal reprend l’émission « PERSPECTIVES » de la Radio DjiiDo au cours de laquelle un entretien a eu lieu avec Messieurs Pabouty, Wamytan (élus FLNKS en Province Sud et Congrès) et d’Anglebermes (membre du Gouvernement).Pour des questions d'ordre pratique, le journal n'accorde ici dans ses colonnes que les propos de Roch Wamytan et de Sylvain Pabouty. Ceux de Jean Louis d'Anglebermes feront l'objet du prochain numéro, le 10...


Voie du FLNKS : Mai – 2009 Mai 2010, un an après les élections provinciales, il est temps de faire un bilan d’étape. Commençons par la Province Sud. Vous êtes 4 élus FLNKS sur 40 au sein de l’Assemblée de la Province Sud, vous avez été élus sur un programme, un an après où en est-on et pouvez vous rappeler pourquoi lors de votre campagne avoir choisi le slogan « Un peuple en marche » ?
Roch Wamytan : Lors de notre campagne de l’année dernière, nous voulions être dans une dynamique. Nous voulons être tout le temps en mouvement, cela fait partie de notre histoire. Le peuple kanak n’a jamais accepté l’autorité française depuis 1853, depuis le début de la colonisation nous nous battons pour recouvrer notre pleine et entière souveraineté et c’est dans ce mouvement là que nous nous plaçons. Entre 2014 et 2018 nous devrions atteindre notre objectif, grâce à l’outil que représente l’Accord de Nouméa, dont il faut obtenir l’application dans son esprit et dans sa lettre. C’est dans cette dynamique là que nous nous plaçons.
Le second point c’est que dans cette dynamique nous ne sommes plus seuls, nous le peuple kanak dans cette Kanaky de Demain. Nous avons accueillis ou on nous a imposé des quantités d’autres peuples qui sont arrivés sur notre sol. A présent, le peuple kanak ne peut pas faire à lui seul son indépendance, nous avons pris en considération la présence des autres communautés qui sont à nos côtés désormais, sur la Terre de nos ancêtres. Donc, nous disons, qu’il faut associer tous ces peuples et depuis Nainville les Roches (1983) et avec les Accords de Matignon, et l’Accord de Nouméa, nous partageons ce droit à la liberté, à la souveraineté, avec les autres populations pour faire émerger un peuple qui ait une conscience commune d’appartenir à un peuple qui va être appelé prochainement à son accession à la souveraineté.
Sylvain Pabouty : Il faut aussi dire qu’on est dans la troisième mandature de l’Accord de Nouméa, qui est très importante. Cette mandature va se clore en 2014… date symbolique parce qu’elle ouvre la période à partir de laquelle on peut organiser un référendum pour l’accession à la pleine souveraineté. Cette période est donc primordiale pour qu’on effectue tous les transferts de compétences. C’est important qu’ils soient tous effectués, il faut mettre de notre coté tous les atouts pour pouvoir accéder ensuite aux compétences régaliennes…

VdF : quand on reprend votre programme, on y trouve la citoyenneté, la lutte contre la Vie Chère, l’emploi local, le rééquilibrage économique, le développement durable, la solidarité, la santé, la lutte contre les fléaux sociaux, l’enseignement de qualité, les signes identitaires… Quelle a été votre première préoccupation, quelle est votre stratégie alors que vous êtes dans l’opposition ?
Sylvain Pabouty : Effectivement, nous sommes dans une opposition que nous qualifions de constructive. On a commencé déjà par se familiariser avec l’institution. Il ne faut pas oublier que la Province Sud, c’est l’institution provinciale la plus importante du pays avec un budget de 75 milliards. C’est aussi les 3 quarts des habitants de Kanaky,180 000 habitants. C’est là aussi qu’il y a le plus d’infrastructures, etc. D’ailleurs, à ce propos on peut citer le dernier rapport de la Chambre Territoriale des Comptes concernant la politique de la Province Nord qui regrette que d’ici 2018, sur les 600 milliards d’investissements qui auront lieu dans le pays, les trois quarts seront encore concentrés dans le Sud ! La Chambre Territoriale le regrette et nous, le FLNKS, c’est quelque chose que nous avons toujours dénoncé, au nom du rééquilibrage à la Province Sud et au Congrès. Il faut faire en sorte que les investissements futurs soient concentrés en dehors du Grand Nouméa, aux Iles ou dans le Nord, or on voit que ce n’est pas le cas !Néanmoins on est dans une opposition constructive, dans l’esprit de l’ADN : on essaie d’orienter les politiques publiques pour que les citoyens se sentent de plus en plus responsables et se sentent prêts à franchir le pas de l’émancipation. Alors déjà, on n’est que quatre mais nous tâchons d’être présents dans toutes les commissions, on a chacun 4 commissions. Roch est dans 4 commissions, mais en plus il est président de la commission relative à l’enseignement privé, qui est symbolique pour nous les kanak car c’est de ces enseignements que sont sortis la plupart de nos cadres. On fait l’effort d’être présents également dans les Conseils d’administrations. Se familiariser, c’est prendre contact avec les Directions, les Services provinciaux pour défendre les dossiers qui sont identifiés et tous les dossiers que les gens sur le terrain nous signalent, pour qu’on puisse les pousser, les soutenir !

VdF : Passons à la circulation… Chaque matin c’est un véritable casse-tête pour rentrer dans Nouméa… nous avions proposé de décentraliser certains services, qu’en est il ?Sylvain Pabouty : déjà l’année dernière, on a essayé de faire passer ce message. En ce moment l’exécutif a proposé un plan pour l’amélioration de la circulation, il y un plan d’un milliard quatre cents millions… Nous leur avons demandé de réfléchir à la possibilité de décentraliser les lieux de travail pour que les gens n’aient pas à venir tous aux mêmes endroits. On ne peut pas agir tout de suite sur les entreprises et l’économie, mais sur les administrations on pouvait le faire. A quoi bon avoir construit cet énorme bâtiment administratif en face du siège de la Province Sud et à côté de celui du gouvernement ? Il fallait donner l’exemple avec ce bâtiment de 1,5 milliard et le construire à Païta ou Dumbéa… Il fallait discuter avec les coutumiers de manière générale pour qu’ils attribuent du foncier !

VdF : L’Exécutif actuel du Sud souhaite modifier la clé de répartition entre les provinces au prétexte que la population du Sud augmenterait du fait d’un afflux de la population venant du Nord et des Iles. Dans leur rapport, ils estiment le montant des aides attribuées aux gens du Nord et des Iles à près de un milliard trois cents millionsSylvain Pabouty : La Province Sud s’est basée sur une étude très discutable, puisqu’elle se base sur les lieux de naissance des personnes. Nous au FLNKS, tant que l’objectif de rééquilibrage n’est pas atteint, nous ne voulons pas qu’on revienne sur cette clé de répartition. Par ailleurs, on est conscient que la Province Sud a des dépenses qu’elle ne peut pas toucher : la santé, les aides sociales, l’habitat social, etc. Nous avons proposé à l’Exécutif de réfléchir sur la mise en place d’une fiscalité locale, avec des commissions ou sous-commissions auxquelles le FLNKS participera. Et Cela s’insère dans une proposition visant à réformer la fiscalité globale de la Nouvelle Calédonie, de tout le pays, et cela a commencé déjà avec l’adoption de la Taxe communale d’aménagement.

VdF : Cette étude qui se focalise sur les populations venant du nord et des Iles en Province sud évite de parler de tous ceux qui viennent de l’extérieur du pays, l’immigration : Or, ces personnes venant de France, de Guadeloupe, de Wallis et Futuna, etc. représentent près de 24 % de toutes les demandes d’aides sociales en matière de logement !
Sylvain Pabouty : C’est vrai que cette étude de la Province sud qui essaie de calculer le montant des aides sociales qui seraient servies aux habitants du Nord et des Iles est vraiment discutable et nous regrettons cette façon de travailler de l’exécutif. Nous ne sommes pas du tout d’accord avec leur façon de calculer leur montant, car il ne faut pas tenir compte du lieu de naissance, mais de la date d’arrivée en province sud. Nous avons des familles du Nord et des Iles qui sont nées au Nord et aux Iles mais qui vivent en Province Sud depuis les années 50 ou 60 et qui ont contribué par leur présence, leur travail à l’enrichissement de cette province et pourtant ils sont dans le décompte de la Province Sud alors qu’ils sont là depuis des décennies et ils voudraient que ce soit les provinces Nord et Iles qui paient pour ces personnes ?

VdF : M. Roch Wamytan, vous êtes chef du groupe FLNKS au congrès, quelle est l’ambiance de travail au Congrès en ce moment ?
Roch Wamytan : pour revenir sur l’ambiance, c’est vrai que ce n’est pas tous les jours roses. Nous sommes pris dans les tourbillons du Pacte Républicain qui a quasiment volé en éclats dernièrement… Nous assistons à des diatribes, des conflits à n’en plus finir avec de la politique politicienne à la petite semaine de leur part. De notre côté, ce n’est pas parfait non plus, puisque avec nos deux groupes au Congrès nous sommes obligés d’essayer de trouver de la cohésion. Je rappelle à ce propos qu’il y a un an, le FLNKS s’était fixé comme objectif de voir dans quelle mesure les élus indépendantistes pourraient travailler au sein d’un seul groupe. Alors les conditions ne sont pas encore réunies, mais nous y travaillons. Voilà, ce qu’il faut retenir c’est notre objectif, la souveraineté pleine et entière et le fait que nous sommes un peuple en marche…

VdF : Est-ce que ce ne serait pas le bon moment pour concrétiser l’unité du peuple kanak en n’ayant qu’un seul groupe FLNKS au Congrès.
Roch Wamytan : On peut le faire. Il faut qu’on négocie entre les groupes UNI et FLNKS. Il faut qu’on trouve des convergences. Nous sommes d’accord sur beaucoup de dossier, mais il faut qu’on s’attaque à la question de la stratégie politique. Tous les partis indépendantistes, même le Parti Travailliste, le LKS, le parti de Jacques Lalié sont d’accord sur l’objectif final, mais voilà ce sont les chemins pour y parvenir qui diffèrent. Cela amène des conflits, des contentieux qui ont du mal à se régler dans le temps, sans compter avec les conflits de personnes qui viennent se surajouter à cela. Il faut qu’on règle le problème au fond. Par exemple, la démarche de l’Ouverture Citoyenne nous a fortement handicapée aux dernières élections ; elle nous a fait perdre beaucoup de sièges et nous aurions eu par ricochet plus de sièges au Congrès et au Gouvernement. Sur cette démarche, il faut que les concernés nous expliquent, on ne s’est pas encore expliqué sur cette liste tirée par Louis Mapou qui nous a fait du tort. Ce manque d’explications plombe nos tentatives d’unification des deux groupes au Congrès. A ce sujet, j’interpelle le Bureau Politique du FLNKS pour que dans les semaines qui viennent il organise un Congrès ou un Bureau Politique élargi pour que nous puissions discuter au fond de cette démarche d’Ouverture Citoyenne, dans laquelle nous trouvons des personnalités à la fois du Palika et de l’Union Calédonienne.

VdF : Qu’en est-il du projet de Loi sur l’emploi Local qui est en attente d’une seconde lecture ? Ou en est-on ?
Sylvain Pabouty : Les turbulences au sein du Pacte Républicain ont des conséquences sur l’application de l’Accord de Nouméa. C’est le cas pour les signes identitaires. Il faut que la commission des signes identitaires se réunisse et ensuite passe le dossier au Président du Congrès qui le mettra à l’ordre du jour d’une session pour ce qui est de l’hymne, le graphisme des billets de banque et la devise du pays. Ensuite, les deux autres signes identitaires pourront être abordés de manière moins passionnelle, après le comité des signataires de fin juin. Sur la Seconde lecture de la loi de Pays relative à la Protection de l’emploi local dans le privé, il faut qu’on le fasse. Car, encore après, il faudra que l’on vote encore les mesures de la mise en oeuvre de la Loi de pays et cela va prendre du temps parce que les partenaires sociaux du privé doivent se réunir. Il restera encore à voter le texte sur la protection de l’emploi local dans le secteur public. Nous espérons que beaucoup de choses se débloqueront avec le comité des signataires…

VdF : Pensez vous qu’à l’horizon de 2014 nous respecterons le calendrier de l’ADN ?
Roch Wamytan : écoutez, ça ne tient qu’à nous, les groupes politiques, le gouvernement et le Congrès ! Il faut qu’on arrive à l’heure au rendez vous de 2014 : avec le transfert de toutes les compétences, il ne faut pas que les conflits internes, les conflits de personnes priment sur cet objectif là.
Sylvain Pabouty : C’est aussi une question d’état d’esprit. Il faut aussi rester optimiste. On est engagé à fond dans l’Accord de Nouméa, le cadre est là, l’objectif est clair pour tout le monde. On souhaite bien sûr que le timing soit respecté. Il y a des conditions à remplir pour que tout se passe bien au niveau du Congrès et des trois Provinces. Il faudrait un cadre commun à tous les niveaux y compris les communes pour que l’Accord de Nouméa soit mis en oeuvre à tous les niveaux et si chacun fait un effort, on pourra y arriver.

VdF : quelle lecture faite vous de l’actualité politique ?Sylvain Pabouty : c’est vrai qu’on a des difficultés mais il faut reconnaître que tout cela n’est pas facile. On est en train d’écrire une page d’une histoire qui a commencé depuis longtemps. Nous sommes les héritiers du travail des vieux qui ont commencé la lutte bien avant nous. Nous sommes aussi redevables devant nos contemporains et nous devons réussir ce fameux destin commun et que le pays accède à la pleine souveraineté avec tout le monde. Il y a encore des incompréhensions, des difficultés… Le plus important, c’est que les uns et les autres prennent conscience du calendrier qui est le nôtre, du chemin qui est borné. L’Accord de Nouméa est quand même une chance pour qu’on retrouve notre dignité.
Roch Wamytan : Ma lecture se place dans l’objectif final : l’indépendance. Toutes nos actions se placent dans ce cadre là. Le chemin est tracé et il a des garde-fous : le premier est l’Accord de Nouméa., le second c’est la charte de 1960 sur la décolonisation qui parle du Droit à l’autodétermination des peuples colonisés. Le dernier séminaire pour la décolonisation est là pour acter la fin du colonialisme. Je voudrais citer la déclaration du représentant de l’Algérie M. Mohammed Soufiane qui disait qu’il faut appliquer au mieux la charte de la décolonisation et revenir à l’esprit de départ, je le cite « Nous observons, que par glissements successifs, notre organe du comité des 24 est devenu un forum où les positions tendent à conforter les fondements et les assises du colonialisme comme s’il était question de lui donner une apparence acceptable plutôt que de hâter son élimination. Le colonialisme, sous cet éclairage, est appréhendé comme une oeuvre civilisatrice de même qu’un oeuvre humanitaire dont il faut, pour soigner son image et la légitimer, dissocier des bouleversements violents qui ont irréversiblement modifié la trajectoire des peuples qui ont subi cette colonisation. Plus inquiétant encore, le colonialisme, a perdu dans les débats, son caractère de passif détestable pour se transformer en anodine colonisation dont on pourrait à l’infini gloser sur ses bienfaits et sur ses méfaits » ça nous rappelle quelque chose tout ça, non ? « Cette vision contredit le verdict rendu par la majorité des peuples de la planète, qui en adoptant la résolution 1 514 de l’ONU en 1960 a exprimé clairement sa condamnation totale du colonialisme que Jacques Duclos, auteur français, qualifiait de « honte du XX° siècle » !Il faut donc y aller et poursuivre le travail jusqu’à l’accession à l’indépendance.
L’autre borne aussi qu’il faut garder à l’esprit et le Président Gomès en a parlé, c’est que nous sommes à présent au XXI° siècle, nous ne sommes plus dans les années 1960, avec les grandes vagues de décolonisation et des accessions à l’indépendance. Nous avons affaire avec les réalités nouvelles : nous sommes des petits peuples, 16 petits Territoires qu’il reste à décoloniser, à mettre en condition au niveau de l’économie, du développement durable, pour remplir toutes les conditions pour que nous puissions accéder correctement, dignement à notre droit à l’indépendance.